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Les motos et la guerre |
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La moto remplacera le cheval |
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En 1930, les jeunes officiers qui prônent la mécanisation de l'armée se heurtent à un conservatisme intransigeant: rien ne saurait remplacer le cheval et la cavalerie, affirment péremptoirement les états-majors.
Pourtant, tous les rapports établis vers les années vingt étaient formels: "Le cheval est condamné à plus ou moins brève échéance", pouvait-on lire. "Traîner des chevaux sous le feu de l'ennemi est une hérésie.
Il ne faut pas moins de six chevaux pour tirer une pièce de 75. La même pièce, ses servants et ses munitions peuvent prendre place dans un seul camion".
Mais la tradition de la cavalerie est la plus tenace ; et si, bon gré mal gré, on accepte des motos, ce n'est qu'à la condition de les considérer comme des chevaux... et encore de mauvais chevaux. Dans le journal la France militaire de 1939, à quelques mois de la guerre, on lit avec stupéfaction: "Le cheval n'offre que des avantages par rapport aux véhicules motorisés, coûteux d'achat et d'entretien et de courte existence, très vulnérables aux attaques aériennes, inaptes à parcourir tous les terrains, incapables de franchir les lignes d'eau, de circuler par verglas ou sans lumière dans l'obscurité, de traverser bois et marécages".
La France, en gérant la tradition, est en train de perdre la guerre. En Allemagne, si l'on sait qu'une moto n'est pas capable de sauter les haies ou de se nourrir en broutant l'herbe des fossés, on prouve chaque jour qu'elle peut accomplir des prouesses qu'aucun cheval n'est capable de réaliser.
Un manège comme pour les chevaux Ces photos ont été faites à la caserne de Bourgoin en 1943. Même à cette période très avancée de la guerre, on continuait à apprendre à monter à moto sur des principes rigoureusement calqués sur ceux de la cavalerie. Cette méthode, discutable, ne permettait pas d'apprendre l'équilibre, mais servait à familiariser les motards avec les différentes manettes de la machine: débrayage, gaz, décompression, changement de vitesse, freins, etc. |
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Mieux qu'un cheval |
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Ceux qui y croient s'imaginent que la moto peut faire beaucoup mieux que le cheval: aller plus vite et plus loin, transporter plus de charges. A cette époque, on croit même que le servant du fusil-mitrailleur pourra se servir de son arme fixée sur le side-car.
On met au point un système de fixation qui permet de tirer dans tous les azimuts, y compris à la verticale contre les avions. On découvre aussi les possibilités du side-car qui, bien aménagé, joue le rôle d'une véritable camionnette.
Cet engouement pour la moto a sans doute fait oublier aux états-majors la nécessité de concevoir un véhicule de reconnaissance à quatre roues motrices telle la jeep. |
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La Sevitame |
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Vers 1935, à la demande du service technique des armées, Marcel Violet construit une moto amphibie tout terrain pesant 120 kg. Le projet accepté, la Sevitame (sigle Sevitame: Société d'Etude des Véhicules Issus de la Technique Automobile Moderne et Economique (sic)) est commandée à 40 000 exemplaires aux usines Simca.
A la fin de l'année 1939, une centaine d'exemplaires sont réalisés. Lors de l'invasion Allemande, l'usine est occupée et tout le matériel est réquisitionné. Un seul exemplaire connu resta en France, celui dont s'empara un ouvrier pour s'enfuir et qui fut ensuite donné au musée de Cleres. |
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Motocyclette "Type armée" S.E.V.I.T.A.M.E. (Publicité faite en 1938) |
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Conçue pour passer partout et remplacer le cheval. Circule sur n'importe quel terrain: friches, labours, herbes, bois, raidillons, remblais de chemin de fer. Les organes mécaniques sont protégés de façon à pouvoir franchir desgués. Le bloc-moteur peut-être immergé soit partiellement soit même totalement. Pas de chaîne. Transmission directe sur la roue. Silencieuse. En quelques minutes la machine se démonte en trois tronçons.
Une quantité importante d'huile (huit litres) circulant à l'intérieur du bloc moteur assure un refroidissement parfait, et permet à l'ensemble d'être utilisé dans des conditions de lenteur et de température exceptionnelles, sans avoir à redouter jamais ni échauffement ni congélation.
La moto gravit sans effort ni élévation de température une rampe de 45° (100%). S'arrête au milieu de ladite rampe, et, compétement arrêtée, repart sans difficultés: ceci grâce au bloc-moteur à refroidissement par huile permettant une vitesse-treuil spécialement étudiée allant de 2 à 8 km à l'heure.
Vitesse normale: 75 à 85 kilomètres Poids toute équipée: 120 kilos Capacité du réservoir: 20 litres Rayon d'action: 500 kilomètres Cylindrée: 250 cm3 et 330 cm3 |
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Quelques expériences: |
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Franchissement des buttes de tir du polygone de Vincennes avec un homme en tansad, traversée de mares boueuses dans lesquelles la machine s'enfonce de 40 cm (mesurés).
Une piste d'essai spéciale de tanks (2,400 km) est parcourue en totalité à deux reprises sans difficultés.
Les personnalités présentes aux essais déclarent qu'aucune autre machine actuellement en service ne serait capable d'une telle performance.
Traversée d'une zone de trous d'obus, tranchées, etc. Remorquage à très faible allure d'une voiture en panne.
La température de l'huile du bloc après utilisation prolongée de la vitesse-treuil (2 heures) n'a jamais dépassé 72 degrés. |
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