La sortie, c'est par là ! La But se rebiffe avec Guilleux
La remarquable performance de la 350 But à moteur Yamaha
Hervé Guilleux sur la 350 But. Ils se sont rencontrés, ils se sont aimés. Dommage pour Guilleux, dommage pour Eric Offenstadt, mais la victoire de Patrick Fernandez lors du GP de France au Mans, a un peu éclipsé la remarquable performance de la 350 But à moteur Yamaha qui termine à la 4e place devant Kork Ballington en personne. Personne ne l'attendait celle-là ! Son histoire mouvementée et ses échecs successifs avaient rendu la But incrédible. Plus personne n'avait confiance en cette moto. Plus personne sauf son papa, Eric Offenstadt et un certain Hervé Guilleux qui a accepté tout de suite la proposition d'Offenstadt de conduire la But après que les frères Chevallier aient décidé de ne plus perdre leurs énergies à essayer de mettre cette machine au point. Car les résultats inattendus de la But au Mans posent un certain nombre de questions qui risquent de faire grincer bien des dents, particulièrement celles de ceux qui avaient déjà envoyé la But au musée. Force est de constater que les frères Chevallier (Olivier le pilote et Alain le technicien) ont rendu la 350 à Offenstadt sans que cette moto se soit qualifiée en Grand Prix. Et la voilà qui frôle soudain le podium au Mans.

C'est pour le moins curieux. Personne ne met pourtant en doute le travail accompli par les deux frangins entre chaque course pour tenter d'améliorer point par point la moto d'Offenstadt. Hervé Guilleux le reconnaissait d'ailleurs à l'arrivée: "Si la But finit aujourd'hui 4e, elle le doit en grande partie au travail accompli par Alain et Olivier Chevallier depuis le début de saison. Il ne restait plus que quelques points à revoir pour qu'elle soit définitivement compétitive." Ce que Guilleux oublie de dire, c'est que son attaque fabuleuse dont le style rappelle étrangement celui de Sarron, dos rond, épaules rentrées tout en restant dans l'axe de la moto, sans déhanchement et sans genoux racleur de bitume, y est également pour beaucoup. En clair, on peut dire que pour Guilleux, la But représentait un espoir vital, terriblement motivant. Une motivation qui vaut bien une poignée de secondes par tour, c'est-à-dire la marge qu'il y a entre une élimination aux essais ou une qualification au milieu de la grille. Guilleux a mangé de la vache enragé, pendant de trop longues années. La But avait sans doute besoin qu'on lui fasse spontanément confiance. Guilleux aux abois ne pouvait faire autrement. Mais on comprend aussi qu'Olivier Chevallier ait perdu cette confiance alors même que la moto s'améliorait progressivement. La machine qu'il avait touché en début de saison pour la faire courir en Grand Prix n'était pas au point. Et à force de réglages souvent ingrats, il a fini par perdre le feu sacré. La mise au point de cette moto lui faisait sacrifier sa saison et il a connu une réaction de rejet vis-à-vis de cette moto au moment où malheureusement son frère et lui-même avaient réussi à la faire marcher à peu près correctement. Quoi qu'il en soit, une page de l'histoire de la But est maintenant tournée. La voilà relancée après un accouchement pénible qui est l'oeuvre d'un peu tout le monde, des Chevallier dans le rôle ingrat et de Guilleux dans le rôle glorieux qu'il mérite bien. Il débute en coupe Kawa en 1973, sans gros moyens et sans grands résultats. Mais l'année suivante, il est dans le coup et termine dans les tous premiers du classement final. Suit alors une longue période noire, sans argent avec des TZ qui manquent de santé.

On finit quand même par remarquer son casque noir à la bande jaune oblique qui lui donne un curieux air penché. Guilleux se bat en tête des courses inter 750 en France, mais il tombe encore beaucoup et surtout son manque de moyens l'empêche de faire une saison suivie. En 78 et cette année, on remarque encore ce pilote dont l'attaque épate tout le monde et dont la moto reste vierge de tout sponsor. Conduire la But au Mans était une aventure formidable pour Hervé qui y a mis tout son gros coeur. Avec le succès qu'on connait. Et avec un grand coup de chapeau pour ne s'être pas mis par terre sur la patinoire du Bugatti sous la pluie en 350, en réussissant à maîtriser son tempérament pourtant généreux alors que bien d'autres plus cotés que lui allaient tâter du bitume. La But et Guilleux regardent maintenant l'avenir. Dans un premier temps, ils vont aller courir toutes les courses inter de fin de saison, particulièrement en Angleterre où il y en a beaucoup. Pour l'an prochain, l'objectif sera les Grands Prix 350 - si Grands Prix il y a avec le problème des World Series - et si 350 il y a, vu que la FIM voulait supprimer cette catégorie, ce qui paraît de moins en moins probable. Le grand problème reste cependant la question financière.

La chaîne de distribution d'électroménager But arrête son soutien au vu des résultats malgré tout décevants sur l'ensemble de la saison. Eric Offenstadt se demande maintenant qui voudra bien s'intéresser à son prototype, dont la mise au point est encore loin d'être achevée. En ce qui concerne la partie-cycle, il reste encore des zones de recherche. Car si la But peut entrer plus vite dans les courbes et accélérer plus tôt en sortie de virage, elle est encore handicapée dans la zone neutre, entre le freinage et l'accélération. Et du côté du moteur, il reste encore beaucoup à faire. Car pour l'instant, la moto que vous avez vu si bien se comporter au Mans possède un moteur de 350 Yamaha. Le dessein d'Offenstadt est bien entendu de faire courir son propre moteur pour lequel il a d'ailleurs de nombreuses pièces d'avance étant donné que ce moteur n'a pratiquement pas tourné cette saison. Guilleux aurait alors une moto 100 % Française entre les jambes. Mais on en n'est pas encore là. Une nouvelle fois, on est prèt à croire à la moto d'Eric Offenstadt. L'affaire se présente mieux aujourd'hui que jamais. Mais une nouvelle déception lui serait sans aucun doute fatale.
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