La sortie, c'est par là ! Les motos militaires Belges
Carte postale (Côte d'Or, bon chocolat) représentant un groupe de motocyclistes du 2ème Rgt de Chasseurs Ardennais sur Gillet 600 lat. type 36. Le chef, au premier plan, ne semble pas avoir remarqué que sa moto a un pneu plat ! Si la firme FN a fourni l'armée Belge lors de la motorisation de 36/40, les deux autres grandes firmes liégeoises ont aussi apporté leur concours et livré des machines que beaucoup de collectionneurs se disputent encore aujourd'hui. Pour rappel, lorsque nous parlons des autres firmes liégeoises, nous ne voulons pas dire qu'il n'y avait qu'elles à construire des motos dans cette période de l'entre-deux-guerres: il y en avait près d'une trentaine en Belgique, mais seules ces trois firmes herstaliennes - FN, Gillet et Saroléa - étaient capables, vu leur potentiel mécanique énergétique et humain, de satisfaire à de grosses commandes militaires. N'oublions pas qu'il s'agissait non seulement de fournir du matériel valable (et Dieu sait s'il était testé) mais également les pièces de rechange indispensables, et cela rapidement vu l'évolution politique internationale.

Après avoir vu la production de la firme FN (voir articles antérieurs), nous abordons cette fois celle de l'usine Gillet. Grande société fondée en 1919 par Désiré Gillet, les motos construites par cette firme liégeoise ont une réputation de solidité à toute épreuve: c'était la moto de l'ouvrier, de l'utilisateur par excellence. Solide, fiable, elle ne réclamait presque pas d'entretien, pouvait être sportive à l'occasion, sa vocation résidant toutefois dans "l'utilitaire". Qui ne se souvient des fameuses 35O cc "Tour du Monde" dont le nom leur avait été donné suite à un raid du motocycliste Français Robert Sexé ? Gillet se devait donc d'être présente dans la motorisation militaire et elle fera tout pour cela. Nous allons aborder les divers modèles d'après la cylindrée.
La 175 cc
10 septembre 1939. Un groupe de militaire au départ de la Coupe Challenge du Corps de Cavalerie sur Gillet 350 cc lat. C'est en 1932 que le type "175" est créé. Monocylindre 2 temps de 175 cc (65x50), complètement monté sur roulements à billes, 3 vitesses à commande manuelle au réservoir, elle peut atteindre 65 km/h tout en ne consommant que 2,5 l de mélange aux 100 km. Il s'agit d'une petite moto bien dans la lignée de la firme et répondant aux besoins de la population ouvrière. D'un prix de 3500 FB, cette "moto légère" (appellation officielle et justifiée puisque sa masse n'est que de 75 kg) est donc bien connue du personnel du Charroi lorsque la motorisation est décidée.

Vu la faiblesse de son moteur, elle est affectée comme estafette légère et surtout comme véhicule d'écolage dès 1935. Par la suite, les officiers des carabiniers-cyclistes en seront dotés (privilège sur la troupe ?) mais il semble que cette dotation sera exceptionnelle, résultant surtout de la récupération de motos abandonnées par les centres d'écolage. Moto "civile" n'ayant aucune ajoute militaire, elle sera utilisée comme telle.
La 350 cc A.B.
La 350 cc lat., en version civile. Encore une moto "civile" qui est aménagée pour l'armée. Moteur monocylindrique à un échappement, 350 cc 4 temps (70x90) à soupapes latérales (solidité et réglages faciles), 3 vitesses à commande au pied et transmission arrière par chaîne en font une moto "passe-partout". D'une masse de 150 kg et pouvant atteindre 95 km/h, elle est également désignée pour le service des estafettes (longues distances) et par la suite pour l'écolage.

Le modèle "militaire" ne se différencie du modèle civil que par l'adjonction d'une selle arrière et par la pose de supports de fontes de part et d'autres du garde-boue arrière. Ajoutons enfin que le modèle civil peut, en option, être livré avec une boîte 4 vitesses. Elle est répartie dans toutes les unités, à commencer par la Cavalerie de la 1re Division. Par la suite, les nouvelles acquisitions la feront "descendre" à toute l'armée.
La 600L A.B.
La 600 lat. en version 39 avec échappement à droite et moteur droit, type militaire. L'armée se fait de plus en plus pressante, les concurrents aussi et le marché semble prometteur. C'est pourquoi, dès 1936, Gillet construit un modèle spécifiquement militaire, en version solo. Fidèle à sa réputation de solidité, le type 4T à soupapes latérales est choisi, mais la cylindrée est portée à 600 cc. Les vitesses, au nombre de 3, ont des rapports particulièrement bien étagés afin de procurer une souplesse maximum en tout-terrain, et ce malgré son poids de 165 kg.

Equipée à l'arrière d'une selle passager et de deux genouillères type "cavalerie", le détail militaire a été poussé tant au niveau moteur (équipé d'une mag-dyno) que de l'éclairage (éclairage plaque Bosch type "balladeuse"). Il s'agit réellement de la le moto militaire conçue pour cet usage. Créée en 1936 avec moteur incliné et échappement à gauche, elle sera perfectionnée dans le modèle 39 avec moteur droit, 4 vitesses et échappement à droite. C'est la 1re Division des Chasseurs Ardennais qui en reçoit le plus.
La 600 culbutée ST38
Catalogue montrant une 350 cc lat. civile. Bien que ressemblant au modèle précédent, cette moto est totalement différente. En effet, conçue pour le sport, elle est ultérieurement équipée pour l'armée vu sa demande de motos rapides. Moteur 600 cc (84x105), 4 T, à culbuteurs tournant sur roulements à billes, cylindre droit à deux échappements relevés, vaste réservoir d'huile pour le refroidissement, cette moto "respire" la vitesse... Dotée d'un cadre à grande garde au sol spécialement étudié, elle peut recevoir une petite selle passager arrière ; mais ce n'est pas là sa destination (attention aux jambes du passager avec les pots brûlants !). Nous nous trouvons devant une moto dont le moteur essentiellement "sport civil" a été remodelé et placé dans un cadre spécialement étudié pour l'armée, avec en sus des "améliorations" militaires.

Mais l'armée n'a pas besoin de motos de sport et Gillet pense tout naturellement à lui adjoindre un side-car, comme l'a fait la FN avec sa M86. Chaque maison travaillant de son côté, Gillet ne tient pas compte, ne peut ou ne veut pas en tenir compte, bref, ignore les avatars de la M86 ; les mêmes problèmes se posent. Trop lourde, peu maniable à basse vitesse, bien que la roue du side soit motrice à volonté (par crabotage), cet équipage n'a pas plus de chance que son concurrent. Bonne moto solo mais piètre moto attelée, elle n'est commandée qu'en petit nombre (59 livrées en 1937 au prix unitaire de 15180 FB) par l'armée, toutes équipées du side-car mitrailleuse Hotchkiss (barquette sans carrosserie, ni roue de secours, ni extincteur). Attribuée principalement aux Chasseurs Ardennais. Cependant, cette moto attelée "par erreur" sert de base aux essais de la 720 cc.

En effet, avec cette machine, Jean de Longrée et Nicolas de Gorhez, deux " volontaires " de la firme, vont partir essayer cet équipage dans diverses contrées réputées pour leur inaccessibilité. C'est ainsi qu'au mois d'avril 1937, ils se retrouvent au Sahara avec deux attelages équipés de caisses civiles Belgian Side Car, ce afin de ne pas éveiller les soupçons ! Un " mini-Dakar " avant la lettre, qui va se révéler très utile par la suite pour des améliorations de la 720 cc. Pour en terminer avec cette moto spéciale, vu sa relative faiblesse, signalons qu'elle sera abandonnée après la première commande au profit de l'équipage 720 cc plus robuste.
La 720 cc
Vue du moteur 600 cc culbuté ST 38. On remarque les roulements à billes des culbuteurs, la robustesse des pignons primaires et la courbure du tube supérieur du cadre pour le passage du culbuteur d'admission. Voici la deuxième fabuleuse moto Belge ! Communément appelée "750 Gillet" (désignation renforcée par certains prospectus de l'époque), elle peut paraître, de prime abord, semblable à sa "soeur", la FN 12aSM 1000 cc. Au premier coup d'oeil seulement, car notre vue est trompée par la caisse du side-car commune aux trois marques (voir articles précédents). Si la caisse peut faire illusion, la moto, elle, est toute différente, tant dans son type que dans son évolution. Voyons cela en détail. Curieusement, l'histoire de la Gillet 720 cc débute en 1932. A cette époque, on ne parle pas encore trop de la motorisation de l'armée et les usines de Herstal sont toujours orientées vers la production civile. Mais voilà: il y a la crise économique qui se fait durement sentir ; le public ne peut plus se payer de grosses motos comme dans les années 20 et l'on s'oriente, bon gré mal gré, vers des motos "utilitaires".

De ce côté, Gillet est assuré de sa réussite avec son modèle "Tour du Monde" qui se fait un peu vieux, il est vrai, mais qui se vend toujours bien, surtout dans les campagnes. Ayant renforcé sa production de 4T en 350 cc, 400 cc et 500 cc plus utilitaires, la firme peut voir venir avec confiance. Mais si la crise touche l'industrie motocycliste, elle atteint encore plus l'industrie automobile qui verra, dans cette époque, s'écrouler de grandes marques prestigieuses comme FN (autos) et Minerva, faute de commandes et d'aides publiques (tiens, déjà !), sans compter une multitude d'autres plus petits constructeurs et sous-traitants.

Bref, il faut innover et le conseil d'administration de Gillet entrevoit la possibilité de construire un cyclecar dont le prix serait sensiblement égal à celui d'une 600 culbuteurs, en tous cas trois fois moindre que celui d'une petite voiture neuve. Un créneau est à prendre et c'est ce à quoi s'attache le bureau d'études qui se penche sur le problème. La construction type "Morgan" est adoptée, soit deux roues devant et la roue motrice à l'arrière. Des épures sont tracées. Le groupe moteur est, dans un premier temps, le 600 culbuteur déjà en réalisation pour les motos civiles (facilité de construction et outillage déjà disponible), avec de légères modifications. Des premiers essais ont lieu au banc, mais il s'avère rapidement qu'un mono-cylindre ne donne pas assez de souplesse, et comme la firme est spécialisée dans le 2T, elle opte pour un 600 cc à deux cylindres placés verticalement et côte-à-côte.

Coupe frontale du premier type de 720 cc. On remarque nettement l'unité du bloc cylindre et le grand volant d'inertie en bout de vilebrequin. Ce moteur donne d'excellents résultats et semble promis à un bel avenir. Malheureusement, durant ces études, le temps passe et le conseil d'administration décide d'abandonner temporairement le projet cyclecar (il sera repris après la guerre, mais sans plus de succès) pour s'orienter vers la fourniture de motos militaires. On ne parle pas encore de motos tractées mais de motos solo. Le 600 2T et ses projets sont donc rangés dans des cartons dans l'attente de jours meilleurs. Puis viennent les premiers side-cars et les premiers essais (avec les déboires que l'on sait). Du coup, l'on se souvient qu'il existe, dans les cartons, un moteur plus puissant dont les plans sont déjà dessinés et qu'il suffirait peut-être d'adapter pour avoir un groupe propulseur de premier ordre.

On exhume les dessins et l'on porte simplement la cylindrée à 720 cc. C'est le premier type de 720 cc. La caisse du side-car ayant été traitée dans les articles antérieurs (voir FN), nous ne parlerons donc que de la moto proprement dite, étant entendu qu'elle n'a jamais été livrée en solo mais uniquement en attelage side-car. Les premiers essais officiels militaires pour motos tractées "grande puissance" se déroulent entre le l2 avril et le lO mai 1937. FN et Gillet se mesurent sur le terrain.

La moto présentée répond aux caractéristiques suivantes: moteur 2 cylindres, 2T, de 7l0 cc (76x78), développant 2l cv à 3600 tr/min. Echappement double se rejoignant sur le devant de la machine et double pot de détente dont le dernier est fixé sur la partie arrière du side-car. Un robuste châssis double berceau en tubes de 36 mm enserre le moteur. Le démarrage est à kick-starter placé à gauche, juste devant la boite à outils porte-batterie. La boite de vitesses (à crabots avec pignons toujours en prise) est à 4 vitesses par commande au pied et marche arrière par levier à main placé à la droite du réservoir, comme le crabotage de la roue du side (pour la rendre motrice à volonté).

La transmission secondaire est à chaine (contrairement à celle de la FN où elle s'effectue par cardan) et les roues sont interchangeables au moyen de trois broches (*). La fourche avant est du type à parallélogramme déformable avec poignée de prise sur le côté gauche. Les deux selles sont très larges, de type militaire et équipées de genouillères type cavalerie caractéristiques. De petites genouillères ovales sont fixées au réservoir de 17 litres. La partie électrique est confiée à la firme Bosch et la génératrice placée en bas et sur le devant du moteur est entrainée par une courroie en V à prise directe sur le grand volant moteur. C'est là l'astuce de la firme.

La 600 ST 38 militaire. A noter le caractère cross évident de la moto. La "Tour du Monde" ayant un grand volant d'inertie, il est apparu à l'ingénieur Laguesse qu'un tel volant est de nature à procurer une souplesse inégalée, même sur un moteur puissant et d'une forte cylindrée ; c'est pourquoi il en a placé un en bout de vilebrequin, côté droit, dissimulé par un carter en tôle. Les utilisateurs que nous avons rencontrés et qui ont, à l'époque, pu rouler sur FN et Gillet et ainsi pu faire la comparaison ont, tous sans exception, vanté la souplesse exceptionnelle de cette moto qui avait toujours de la réserve au moment où l'on s'y attendait le moins. Un carburateur Amal à aiguille, type 206/144, donne la quantité de mélange nécessaire aux cylindres.

Aux essais, il y a un petit filtre à air, mais à la demande de l'armée, celui-ci sera considérablement agrandi et toujours de marque Amal (il fait d'ailleurs aujourd'hui le désespoir des collectionneurs en quête d'une telle pièce rarissime !), placé sous la selle du pilote, du côté droit. Le compteur est de marque Alfa (maison Mercier, Le Locle, Suisse). Un phare orientable Bosch et la lampe arrière balladeuse de la même marque complètent cette moto. Enfin, voici quelques renseignements généraux sur cet équipage: longueur: 2,55 m ; largeur: 1,60 m ; hauteur hors-tout: 1,27 m ; rayon de braquage minimum: 2,10 m ; masse totale: 454 kg. Outre le pilote et le passager, le side peut recevoir une charge complémentaire de 225 kg (munitions, effets personnels,...). Les possibilités techniques sont les mêmes que celles de la FN 12aSM.

Un groupe de 25 motocyclistes vient prendre livraison de ses machines dans la cour de l'usine. Seule la première moto est une 600 ST 38 ; les autres sont des 600 lat. type 36. Après les premiers essais, l'armée étant pressée, le contrat de fourniture de 784 motos side-car est signé le 7 août 1937 pour un montant global de 14 160 130 FB (de l'époque !) ; les livraisons doivent s'effectuer comme suit: 5 véhicules le 1er septembre (déjà !), 15 véhicules le 5 septembre, 20 véhicules le 10 septembre, puis 55 véhicules par décade ! C'est la Compagnie du Parc des Transports Automobiles à Etterbeek (Bruxelles) qui est chargée de la réception.

Cependant, comme dit précédemment, il s'agit du premier type et, comme tout nouveau modèle, il va révéler ; en cours d'utilisation, ses petites imperfections que la firme Gillet va s'acharner à éliminer. Il ne faut pas perdre de vue que dans le contexte de l'époque, comme le marché militaire est demandeur et que chacun est avide d'obtenir les plus grosses commandes, la moindre imperfection détectée prend une énorme importance, sachant que le(s) concurrent(s) va (vont) l'exploiter et tâcher de faire mieux. C'est une lutte âpre et d'autant plus forcenée que les trois usines "ennemies" sont sur la même commune (Herstal), distantes seulement de 500 m à vol d'oiseau l'une de l'autre... Imaginez les ruses des essayeurs, les tensions dans les bureaux d'étude et les tractations entre les directions. Nous croyons qu'il faut l'avoir vécu pour le comprendre. Finalement, ce sont ces éléments qui, rassemblés, ont engendré une émulation telle que les motos sorties des ateliers étaient pratiquement parfaites.

Jean de Longrée et Nicolay de Gorhez dans le Sahara. Motos 600 ST 38 ; side-car: châssis A.B. mais caisse Belgian Side Car. Mais revenons à la 720. Le plus gros problème est le refroidissement des cylindres à faible vitesse. En effet, à l'origine, les cylindres en fonte au nickel à 2,5% sont alésés dans un même bloc à ailettes de refroidissement et culasses séparées, mais cela ne suffit pas. La firme Mobiloil, en la personne de son directeur technique Monsieur Graftiaux, s'évertue à trouver le pourcentage (6%) et la qualité optimale d'huile pour obtenir un refroidissement convenable et éviter ainsi des "serrages" toujours désagréables... Tous les ingénieurs se rendent aux camps de Namur et de Beverlo où l'on procède à de multiples essais tant sur l'huile que sur les segments (de marque ATE et Claubert & Simon). La firme Amal délègue son ingénieur Hutchings qui détermine enfin le type de carburateur approprié.

Si ces hésitations peuvent paraître surprenantes pour une firme qui livre un produit fini, il faut rappeler qu'il s'agit de véhicules spéciaux sur lesquels rien n'a encore été étudié. D'ailleurs, les mêmes problèmes surgissent chez les concurrents. Bref, durant la période de mise au point, le bureau d'études se penche sur le modèle "39" car l'armée prépare un second concours du 16 août au 10 septembre 1938. C'est la panique chez Gillet: les améliorations à apporter aux motos déjà livrées n'ont pas permis au bureau d'études et aux ateliers de construire le nouveau modèle. Des lettres sont envoyées tant au major Damman, ingénieur des Fabrications Militaires, qu'au ministre de la Défense Nationale, mais en vain.

Le concours aura lieu à la date fixée, sous la pression vraisemblable de la FN qui y voit une occasion d'évincer un concurrent. Gillet présente donc trois motos "38" améliorées qui, évidemment, ne donnent pas le résultat escompté. De plus, la FN, avec son modèle 12aSM, atteint des vitesses de loin supérieures à celles prévues par le cahier des charges, ce que Gillet n'a pu faire avec son ancien modèle.

La 720 cc tractée, avec side-car, premier modèle. En résumé, la commission militaire est défavorablement impressionnée par les prestations des 720. Elle retient cependant une plus grande simplicité d'utilisation ; c'est elle qui réclame le moins de soins, et enfin, aucun ennui grave n'est survenu durant tout le concours. Tout n'est donc pas perdu et la direction des établissements Gillet va, après coup, présenter à l'armée et au ministre son modèle " 39 " enfin prêt, cela vers le 15 septembre. Ce type " 39 " présente les améliorations suivantes: cylindres séparés sur presque toute la hauteur, puissance portée à 23 cv, balayage des gaz selon le procédé Schürle, le double pot de détente est supprimé pour n'en laisser qu'un (le pot fixé à l'origine sur le side est supprimé, l'échappement faisant alors corps avec la moto proprement dite). La contenance du réservoir est portée à 20 litres et la puissance de la batterie à 10 Ah ;

Essais en pente de la 720 cc premier modèle. les compteurs Jaeger sont préférés aux Alpha et enfin, un plus grand soin est apporté à la finition des caisses side-car. Une multitude d'autres petits détails sont encore apportés (goupilles de sécurité, boulons de section plus forte, etc.). Tant et si bien que l'armée reverra sa position mais ne commandera finalement que 147 équipages (c'est toujours mieux que rien, mais la FN en a obtenu 750 !). Gillet fulmine et se démène par des lettres prouvant sa bonne foi et les "manoeuvres" visant à l'évincer (**). L'usine ne s'avoue pas vaincue et prépare un tout nouveau modèle - le "40" - qui possède un réducteur dans le moyeu arrière, commandé non plus par un levier au réservoir mais par une pédale.

Essai de la 720 cc pilotée par Joseph Distexhe. Notons le renforcement des bielles et du vilebrequin tournant sur roulements à galets, l'admission des gaz aux cylindres par distributeur rotatif, le carburateur inversé Solex, la boite à 5 vitesses avant (le surmultipliée pour le tout-terrain) et marche arrière, le guidon plus large, une batterie de 15 Ah, etc. L'entrée en guerre empêchera la livraison en grandes quantités de ces motos à l'armée, motos arrivées à un point de perfectionnement tel qu'elles auraient fait l'unanimité à la commission militaire (la 12aSM de la FN aurait alors été largement dépassée). Pendant ce temps, d'autres pays s'intéressent aux 720, dont la France: c'est ce que nous verrons lors de notre prochain article.

Notes:

* Collectionneurs, attention: il existe des broches avec filet à gauche et à droite (pour roue avant et arrière); prenez garde lors du remontage d'une roue isolée !

** Détail malheureux: lors du concours de 1938, un des essayeurs Gillet, fier de sa machine et de ses performances (alors qu'il ne s'agissait que du modèle amélioré) et vu la mauvaise impression de la commission, a fait des gestes manquant de correction (sic) vis-à-vis des membres de cette commission. Cela n'a certainement pas amélioré l'humeur de ladite commission !
Informations tirées de VMI (Véhicules Militaires International) N° 23 du 15 avril/15 juin 1988.
Par Charles Gillet.
Haut de Page