La sortie, c'est par là ! Virginio Ferrari
Une seule passion: la moto
Un entraînement impitoyable en salle mais aussi en milieu naturel. Canoé, footing, tennis, rien n'y manque ! Une - deux, une - deux... trente kilogs à bout de bras, Ferrari est en pleine séance de musculation. Cinq minutes de repos et il faut recommencer. Depuis deux ans, le nom de Virginio Ferrari revient perpétuellement à la une des journaux. Vice-champion du monde 500 cm3, Ferrari est un garçon passionné et... passionnant. Une - deux, une - deux... trente kilogs à bout de bras, Ferrari est en pleine séance de musculation. Cinq minutes de repos et il faut recommencer. Un entraînement impitoyable en salle mais aussi en milieu naturel. Canoé, footing, tennis, rien n'y manque ! Sa saison en or, Ferrari l'a en partie construite grâce à une forme physique d'athlète de haut niveau.

Sa famille étant installée sur les rives du lac formé par les eaux de l'Idroscalo près de Milan, Virginio travaille sur l'eau, dans les bois en attendant la piste. Mais alors, Ferrari est le prototype même du garçon sérieux, du vrai champion, ne faisant aucune concession à la détente et à la vie normale d'un jeune homme de vingt sept ans ? Pas du tout ! Ferrari prend seulement son travail pour un amusement ; être pilote professionnel, c'est un tout ; il faut être prêt quand le grand moment est venu et puis il y a ceux qui pointent chaque matin au bureau où à l'usine.

Avec ses chiens, en training: un garçon équilibré qui cherche à faire son métier le mieux possible. Lorsque ces derniers deviennent spectateurs, Virginio se doit d'être au maximum de ses possibilités, tout comme un acteur... ou un clown ! Mais Ferrari sait aussi que la moindre erreur peut compromettre toute sa saison ou plus simplement être fatale ; c'est un choix à faire et le jeune champion Italien n'a jamais hésité: être le meilleur dans un sport dangereux, tel est son but. Autrement, Virginio Ferrari est un garçon comme les autres ; il aime la vie (sûrement plus que beaucoup), il s'amuse, s'énerve, se fait du mauvais sang... comme tout le monde.

"Il faut en finir avec le cliché désormais classique du sportif sérieux qui se couche avec les poules et se lève à l'aube ! Si j'ai envie de me coucher à quatre heures du matin, je le fais !" Ferrari disait celà la veille de son départ pour le Grand Prix du Vénézuéla et il le répète maintenant alors qu'il entame une période d'attente longue comme un hiver. Qu'il l'admette ou non, sa forme physique exceptionnelle l'a bien servie ; la preuve en est sa facilité de récupération après les vols planés plus qu'impressionnants de cette saison, dont un à deux cent kilomètres heure !

Il est vrai aussi que tous les pilotes, animés par cette terrible envie de courir, repoussent à chaque fois les limites de la raison. Virginio est un de ceux-là avec peut-être une détermination encore plus folle. Plus d'une fois les médecins ont été surpris par la volonté farouche de ce garçon qui, bien qu'abimé de partout, reprenait le chemin des stands alors que son état ne lui permettait théoriquement pas. Mais sa hargne plus une santé de fer renversaient tous leurs pronostics. Le travail hivernal portait ses fruits.

Vice-champion du monde 500 cm3, Ferrari est un garçon passionné et... passionnant. De plus, Virginio ne peut donner le meilleur de lui-même que lorsqu'il se sent en pleine forme ; une sorte de doping psychologique indispensable pour un pilote que se veut le leader de l'école motocycliste Italienne et l'un des trois premiers pilotes du monde. Revenons en arrière ; après sa victoire au GP du Nurburgring fin 78, Ferrari est devenu l'idole des foules de l'autre côté des Alpes. Ce pays avait besoin d'un "nouvel Agostini", d'un homme hors du commun pouvant attirer l'attention d'un autre public, moins friand de moto.

Platini pour le football, Noah en tennis, Lafitte en Formule 1, chaque sport à ses personnages dont le nom dépasse largement le cadre du noyau de fanatiques propre à chaque milieu. Aussi en Italie, Ferrari est vite devenu une vedette à part entière, en quelque sorte le successeur du "Maestro" déjà nommé !

"Je pense pouvoir prendre place parmi les tout-premiers" déclarait, avec prétention selon certains, Ferrari au début de l'année 79. Le but est atteint, un grand champion est né. Mais Ferrari n'a pas seulement été celui qui a redonné aux Italiens la passion de la moto. Ce qui compte le plus sur le plan sportif, c'est le fait qu'il ait été le seul véritable adversaire de Kenny Roberts.

Ferrari contre Roberts, Suzuki contre Yamaha, les spectateurs du Grand Prix de France au Mans en septembre 79 ont tous été pris par la fantastique bagarre que se livrèrent les deux hommes. Ferrari a perdu, Roberts a gagné, un résultat indiscutable mais Virginio, avec son intelligence habituelle, tire les conclusions de la saison dernière alors que la prochaine s'annonce passionnante après un hiver ne manquant vraiment pas d'intérêt !

En course, Virginio ne peut s'empêcher d'attaquer, mais son expérience commence à faire le poids et ses fautes sont de plus en plus rares. "Au Vénezuéla, tout s'est bien passé mais Kenny n'était pas là, il n'y a donc pas eu de confrontation et je restais un peu sur ma faim. En Autriche, j'ai du changer de pneu avant sur la grille de départ mais malgré cela, ma moto ne tenait pas la route. En Allemagne, j'avais super mal aux dents et les antibiotiques, s'ils ont calmé ma douleur, m'ont complètement mis KO. Idem au Grand Prix d'Espagne ! Je ne pouvais pas m'entraîner comme je le voulais et ne me sentais pas au mieux de ma forme.

Etre diminué de manière aussi bête ! Ma chute aux essais à Imola ou les problèmes techniques que nous avons rencontré en Espagne n'avaient à la limite pas d'importance. Pour une histoire de mal aux dents, tout était par terre. Puis il y a eu Assen. Tout allait bien à part ma main blessée ; c'était au tour de Kenny de connaître son lot de malchance, et puis quelle bagarre avec Sheene ! La Suède et la Finlande, pas la peine d'en parler, la moto n'allait pas.

Presque la même chose en Angleterre. Et puis vint le GP de France, le championnat était déjà fini bien que sur le papier, j'avais encore quelques espoirs d'être champion du monde. Tout a faillit d'ailleurs très mal se terminer avec cette chûte avant les esses du Bugatti !"

Virginio Ferrari. Pour Virginio, 79 a été une année de transition. Analysons avec lui les hauts et les bas de cette saison. Ce qu'il y a eu de mieux: "C'est bizarre, rien ne me vient à l'esprit ! Par contre, je peux parler du plus moche ! Ça été toute cette période où je n'arrivais pas à me sentir bien ; impossible de concrétiser ce que je savais pouvoir faire". Ce qu'il y a eu de plus agréable: "Quant tout va bien, on rentre à la maison satisfait, et on retrouve les amis. Une semaine creuse devant soi pour se relaxer, une semaine où la tension nerveuse si particulière à mon métier se fait moins forte. Ça m'est arrivé après le GP de Yougoslavie.

Je courrais pour la première fois depuis ma chute à Nogaro ; ma main était en mauvais état et j'ai complètement raté mon départ. Malgré tout la course s'est bien passé. Puis je suis allé à Assen, pour ce que beaucoup considèrent comme ma plus belle course de l'année. C'est vrai que ce fut une course fabuleuse, ne serait-ce que parce que je l'ai gagnée ! Mais pour moi, ma victoire au MJ 200 sur le Circuit Paul Ricard ou celle du Mugello ou de Salzbourg ont aussi une grande importance. Le plus terrible ce fut quant même Jarama en Espagne ; quelle catastrophe !

Virginio Ferrari. "Quel adversaire estimes-tu le plus ?" "Il y en a deux: Roberts et Cecotto. Vous savez pourquoi ? Parce que Cecotto bien que très malchanceux, a montré qu'il restait un des meilleurs, alors que les conditions ne lui étaient vraiment pas favorable. Je suis heureux qu'au GP des Nations à Imola, il ait surclassé tout le monde en gagnant quatre manches. Johnny s'est donné entièrement, ce qui n'a pas été le cas de tout le monde, et il a prouvé à ses détracteurs qu'il était encore un grand parmi les grands.

Quand à Roberts, c'est tellement évident...! Je voudrais aussi parler de Tom Herron. Beaucoup disait de lui qu'il n'était pas à l'aise en 500. En fait, Tom était très fort, il s'est tué chez lui en Irlande sur un circuit dangereux ; mais c'est ce genre de circuit qu'il aimait et il se serait surement révelé de manière encore plus forte sur les circuits suivants comme Assen, Imatra ou Silverstone".

La saison 79 avait bien commencée puis s'est poursuivie Cahin-Caha avant de se terminer dans la souffrance physique (et peut-être morale !). Maintenant Virginio a les yeux tournés vers l'avenir: "J'ai entièrement récupéré la forme que j'avais au début de l'année dernière et je ne souffre plus de ma chute du Mans. Je change d'écurie (Ferrari court désormais pour le Belge Serge Zago) mais je sais ce que vaux !" "A qui dédies-tu ta saison ?" "Je n'y avais jamais pensé ; mais je veux la dédier à Carlo Fiorentino. Nous étions amis. Nous avions commencé à courir ensemble mais il s'est tué en course au Mugello, juste quant je commençais à gagner".
Ce qu'ils pensent de lui
Virginio Ferrari fait l'unanimité dans les parcs coureurs. Une gentillesse devenue légendaire et un contact facile. Nous le voyons ici en discussion avec (de haut en bas): Philippe Coulon, lui aussi d'une gentillesse proverbiale ; Kenny Roberts, son adversaire qui lui porte une estime d'ailleurs réciproque ; Roberto Gallina, son directeur sportif et père spirituel jusqu'à l'année dernière ; Barry Sheene, un peu dérangé cette saison par Virginio et Grasiano Rossi qui se fera un devoir de l'imiter en 80. Kenny Roberts
Ce que je pense de Virginio ? Pour moi la réponse est trop facile ! Ferrari est fort, terriblement fort mais c'est une réponse quand même trop simpliste. Je n'ai pas découvert Ferrari cette saison. Même avant sa victoire en Allemagne en 78, il avait obtenu son meilleur rendement et je me suis vite rendu compte qu'il faudrait le considérer comme un de mes dangereux adversaires en 500. Je pense qu'à cette époque, Ferrari achevait une longue période de murissement qui lui a permis par la suite d'obtenir de très bons résultats.

J'apprécie beaucoup sa constance, son acharnement à vouloir faire toujours mieux et sur ce point je crois qu'il me ressemble. Même si j'ai deux titres de champion du monde en poche, je ne suis jamais sûr d'être au maximum de mes possibilités, il y a toujours quelque chose d'améliorable. Dans son style, dans sa technique et bien qu'il soit très fort, Ferrari doit se perfectionner et c'est justement parce qu'il est perfectionniste au plus haut degré que je crois en lui.

Cette année, il sera sans doute mon plus redoutable adversaire mais je dois ajouter que Virginio est en course d'une loyauté exemplaire et je le considère vraiment comme un ami ; cela peut paraître paradoxale mais j'ai presque regretté qu'il sorte vaincu de notre long duel et dans un certain sens, je lui souhaite de prendre sa revanche cette année !

La concentration avant la course ; un moment beaucoup plus important qu'il n'y parait. Giacomo Agostini
Depuis longtemps, je pense et je dis que Virginio Ferrari est un pilote très fort et très bien préparé ; n'oublions pas que je l'ai vu à l'oeuvre en 76 et en 77, alors que je courrais encore.Virginio est donc un pilote sérieux et au fil des saisons, il a accumulé une expérience de premier ordre grâce à son écurie qui est toujours resté la même, un facteur de stabilité à ne pas négliger. Au début de l'année dernière, j'ai répété que Ferrari avait d'énormes possibilités, qu'il pouvait arriver au sommet et que 79 allait être année de vérité ; maintenant il est l'heure de dresser le bilan et je m'aperçois que j'ai sous-estimé Ferrari.

Ce garçon a dépassé nos espérances, il a obtenu plus que nous n'en attendions. Virginio Ferrari a disputé le titre à Roberts jusqu'au dernier moment et a fait de très belles courses même en dehors des épreuves du championnat du monde 500 cm3. Cela fait quelques années que le grand public ne suit plus avec un grand intérêt les championnats. Les prestations de Ferrari ont crées un nouveau courant vers ce sport ; le jeune pilote s'est retrouvé seul devant les passionnés de moto qui lui ont toujours demandé plus ; ils voulaient une victoire, Ferrari leur a donnée en Hollande, ils voulaient le titre, mais la malchance s'y est mise ! Virginio Ferrari est maintenant une vedette mais il n'a heureusement pas oublié sa passion de la moto.

Désormais, Ferrari est une vedette à part entière en Italie, ce qui est normal, mais aussi en France où personne n'oubliera sa course courageuse du Mans. Virginio a de nombreux atouts dans son jeu: un physique et une gueule dont on se souvient, un caractère très sociable et une amabilité étonnante, sans oublier une attaque et un sens tactique qui le placent sans conteste parmi les champions du monde en puissance. Il s'en est fallu d'un rien qu'il ne le soit l'année dernière, et Virginio est en pleine forme juste avant la saison 80, alors... Bernard Fau
La première fois que j'ai remarqué Virginio Ferrari, c'était en 75 à Imola ; un fou furieux au guidon d'une 500 Paton complètement dépassée qui s'était qualifié avec un très bon temps... et une attaque démente ! Ferrari a beaucoup d'atouts pour lui: son charme très latin, une finesse et une générosité étonnantes, son nom qui sonne bien et un prénom de rêve. Il a en plus une simplicité et une modestie qui ne sont absolument pas calculées, rien n'est artificiel et Virginio ne porte aucun masque.

Il faut maintenant qu'il trouve son équilibre ; Johnny Cecotto aussi avait presque tout mais il n'a pas vraiment réussi à s'imposer comme une idole telle que Barry Sheene ou Giacomo Agostini. Roberts non plus n'a pas tout pour devenir l'ambassadeur de la moto à travers le monde ; Ferrari et son côté sympathique très Italien est un séducteur. Il est donc tout désigné pour être la locomotive du sport moto mais là encore il y a une question d'équilibre.

Virginio est trop entier, trop généreux ; l'année dernière il a eu beaucoup de chance et s'est bien sorti de ses chutes qui auraient pu avoir des conséquences beaucoup plus graves. Il peut être non seulement champion du monde mais aussi une idole à part entière, il ne lui manque qu'un peu de maturité. Ce qui m'a séduit chez lui, c'est qu'il courre avec le coeur et sa générosité épidermique a conquis tous les amateurs de vitesse.
L'année 79 de Virginio
18 mars - San Carlos - Championnat du monde 500
GP du Vénézuéla: 1er Sheene (Suzuki) ; 2ème Ferrari (Suzuki).
Aux essais: 1er Ceccoto (Yamaha) ;... ; 3ème Ferrari (Suzuki).

1 avril - Mugello - Championnat du monde 750
GP d'Italie: première manche: 1er Sarron (Yamaha 750) ; 2ème Ferrari (Suzuki 653).
Deuxième manche: 1er Ferrari.
Classement final: 1er Ferrari.
Aux essais: 1er Ferrari.

8 avril - Paul Ricard - Moto Journal 200
1er Ferrari (Suzuki 653).
Aux essais: 1er Ceccoto (Yamaha 750) ;... ; 5ème Ferrari.

29 avril - Salzburg - Championnat du monde 500
GP d'Autriche: 1er Roberts (Yamaha) ; 2ème Ferrari (Suzuki 500).
Aux essais: 1er Ceccoto ;... ; 16ème Ferrari.

6 mai - Hockenheim - Championnat du monde 500
GP d'Allemagne: 1er Hartog (Suzuki) ; 2ème Roberts (Yamaha) ; 3ème Ferrari (Suzuki).
Aux essais: 1er Sheene (Suzuki) ;... ; 3ème Ferrari.

13 mai - Imola - Championnat du monde 500
GP d'Italie: 1er Roberts (Yamaha) ; 2ème Ferrari (Suzuki).
Aux essais: 1er Sheene (Suzuki) ;... ; 3ème Ferrari.

20 mai - Jarama - Championnat du monde 500
GP d'Espagne: 1er Roberts (Yamaha) ;... ; 4ème Ferrari.
Aux essais: 1er Baldwin (USA Suzuki) ;... ; 3ème Ferrari.

27 mai - Nogaro - Championnat du monde 750
GP de France: 1er Pons (Yamaha 750). Ferrari chute en première manche et se fracture la main droite.
Aux essais: 1er Pons ;... ; 4ème Ferrari.

17 juin - Grobnik - Championnat du monde 500
GP de Yougoslavie: 1er Roberts (Yamaha) ; 2ème Ferrari (Suzuki).
Aux essais: 1er Roberts ;... ; 6ème Ferrari.

23 juin - Assen - Championnat du monde 500
GP de Hollande: 1er Ferrari (Suzuki).
Aux essais: 1er Roberts (Yamaha) ;... ; 6ème Ferrari.

15 juillet - Paul Ricard - Championnat du monde 750
GP de Suisse: première manche: 1er Frutschi (Yamaha 750) ; Ferrari chute.
Deuxième manche: 1er Ceccoto (Yamaha 750) ; Ferrari chute.
Aux essais: 1er Ceccoto ;... ; 3ème Ferrari.

22 juillet - Karlskoga - Championnat du monde 500
GP de Suède: 1er Sheene (Suzuki 500) ; Ferrari s'arrête en course.
Aux essais: 1er Roberts ;... ; 12ème Ferrari.

29 juillet - Imatra - Championnat du monde 500
GP de Finlande: 1er Van Dulmen (Holl. Suzuki) ; Ferrari s'arrête en course mais se classe 15ème.

12 août - Silverstone - Championnat du monde 500
GP d'Angleterre: 1er Roberts (Yamaha) ;... ; 4ème Ferrari. Idem aux essais.

2 septembre - Le Mans - Championnat du monde 500
GP de France: 1er Sheene (Suzuki) ; Ferrari chute en course.
Aux essais: 1er Roberts ; 2ème Ferrari.
Informations tirées de Motoplay N° 1.
Texte Carlo Canzano. Photos Crose, Varisco, D.P.P.I.
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