La sortie, c'est par là ! Essai 250 Kawasaki Usine
Perspective d'avenir
Les frères Chevallier continuent cette semaine la série d'essais des machines de course qu'ils réalisent pour Moto Journal. Après la 750 Kawasaki, c'est au tour de la 250 twin de Grand Prix d'être confiée aux mains d'Olivier, le pilote, et d'Alain, le technicien.
Toutentitane
250 Kawasaki Usine. Moto Journal N° 347 du 19 janvier 1978. Par Olivier Chevallier. Bien qu'il avoue avoir trouvé difficilement sa position dans la bulle, Olivier Chevallier ne parait pas si mal installé. On voit bien son pied droit dépasser sous le carénage: avec une Yamaha, plus ramassée on ne pourrait voir son pied de cette façon sur une photo prise sous le même angle. En arrivant chez Shenton, dans l'atelier de préparation des Kawasaki d'usine, j'ai tout de suite été attiré par la 250, même si la 750 m'impressionnait beaucoup. Cette deux et demie je l'avais trop vue en Grand Prix taper toutes nos Yamaha d'un seul coup pour ne pas avoir envie de monter dessus. Je ne la trouve pas franchement jolie, mais très fine, elle me fait penser à un lévrier avec sa ligne longue et basse, elle a l'air super légère et mon frère Alain est comme un fou: il n'arrête pas de me dire « Regarde ça, et ça, c'est tout en titane, ça c'est une moto d'usine », bref, il est en transes ! Alain a demandé au Japonais un aimant pour le balader sur les parties métalliques de la moto mais l'autre a dit qu'il n'y en avait pas dans l'atelier.

Quelle blague ! Un aimant c'est aussi indispensable qu'une clé à pipe dans un atelier. Il faisait pas vraiment la gueule mais enfin ça l'inquiétait de voir Alain mesurer sa moto avec autant de soin... Au-delà de la moto il y avait pour moi toute la saison en 250 cm3. Je ne connaissais guère Barry Ditchburn et j'attendais Mick Grant pour pouvoir juger des qualités de cette 250 Kawasaki. Grant a couru contre nous sur des Yamaha et à l'époque il ne nous mettait jamais un boulevard, l'écart entre lui et nous était minime. On l'a donc vu changer de moto d'un seul coup - paf - il a été nettement supérieur à nous tous. Au guidon de la Kawa, Grant se tirait et on ne voyait plus le jour, en particulier sur tous les circuits techniques comme Assen. Cela prouvait que c'était une machine facile à conduire, tandis que sur les circuits comme Spa elle ne pouvait rivaliser avec les meilleures Yamaha en dépit de son excellent aérodynamisme. C'est donc une machine qui tire son avantage de l'utilisation du moteur et non de sa puissance. Très légère, elle accélère comme une balle, et c'est tout cela qui me donnait tant envie de l'essayer.
Le chant du départ
Difficile à l'oeil nu de deviner de quoi est composé cette moto - en matière de métaux bien entendu. Mais sa finesse saute aux yeux en même temps que sa hauteur (relative tout de même). La dissymétrie des deux côtés de la moto est renforcée par l'absence de pot sur le côté gauche. On voit mieux la suspension arrière et aussi la position très avancée du moteur. Je m'assieds dessus et là je ressens une impression bizarre. Elle est très longue, le réservoir est si fin que j'ai l'impression que mes genoux se touchent. Je me crois sur une 125, mais perché à trois mètres du sol parce que je réalise en même temps que je suis haut perché. La sensation est plutôt bizarre mais enfin, il faut la mettre dans le camion et partir pour Brands Hatch... En route je me sens confiant, heureux, comme quand je pars voir un bon film et c'est peut-être à cause de cette euphorie anticipée que je suis revenu un peu déçu...

Ditchburn vient d'effectuer deux tours, il s'arrête, me passe la moto, me crie quelque chose. Je relève ma visière, il veut juste me dire de faire attention au dernier droite encore très glissant, j'aime mieux ça. J'arrête le moteur et m'apprête à pousser. J'ai demandé à ce que l'on ne me pousse pas car je veux démarrer comme en Grand Prix. Cette année j'ai raté trop de départs pour ne pas y attacher d'importance et je veux voir ce que donne la Kawa. Je suis à côté d'elle et je commence à pousser... Je me souviens d'avoir essayé la moto de Tom Herron qui est une de celles qui part le mieux, en moins de deux mètres le moteur tournait. Là j'ai voulu voir si la Kawa partait aussi bien et j'ai été soufflé: elle part encore mieux, on a à peine lâché l'embrayage qu'elle tire déjà, prête à accélérer.

Je saute dessus, je fais cirer l'embrayage et elle se cabre aussitôt: quelle puissance ! Chez Kawa ils ont tout compris: départ aisé et puissance en bas, on largue le peloton dès le baisser du drapeau. C'est tellement important de partir en tête car seuls les meilleurs vous rattrapent et ensuite ils vous tirent et vous aspirent. Tandis que si on part mal, les meilleurs se tirent devant et on est gêné par les moins rapides qui sont devant soi et il n'est plus question de revenir en tête. Si on part mal on ne revient que sur les moins bons.
Mes pauvres poignets
Jean-Francois Baldé a pu disposer d'une monte d'usine au G.P. d'Italie. Par malheur ce fut sa seule occasion et il a dû ensuite revenir à l'ancien modèle. Yvon Duhamel à Ontario en 1975 lorsqu'il domina nettement les Harley-Davidson d'usine (dont celle de Villa) et la Yamaha quasi officielle de Steve Baker. Je fais quelques tours pour me mettre la moto en mains, lentement car je n'ai jamais aimé me brusquer. Mais je n'arrête pas de chercher ma position, j'essaye de rester allongé dans les courbes pour la tenir, j'essaye de reculer pour mettre du poids sur les repose-pieds, il y a quelque chose qui ne va pas. En fait c'est le triangle selle-guidons-repose-pieds qui ne va pas. Celui des Yam est idéal, celui de la Kawa est mal proportionné. Alain l'avait d'ailleurs remarqué du premier coup d'oeil. J'ai vraiment l'impression de faire des échasses, mes pieds mal à l'aise et les mains crispées sur mes bâtons. Je me souviens de mon premier contact avec une Yam, au bout de trois tours j'étais à l'aise.

En moto on conduit du bout des pieds, il faut avoir toute sa sensibilité sur la semelle afin d'avoir les mains libres, comme en trial. Mais sur cette Kawa j'ai tout mon poids sur les bracelets et je sens mal la moto, c'est pas le pied ! La position, c'est très important: à la limite, on recule les repose-pieds sur l'axe de la roue arrière, on n'a plus de poids sur les pieds et tout sur les poignets, alors que pour bien piloter il faut assurer son équilibre par les pieds et avoir les mains libres pour manoeuvrer le guidon. Trop de poids sur les épaules et les bras diminue cette sensibilité des mains. Sur la Kawasaki, cela vient de la distance selle-guidons ; et en plus la faible chasse a tendance à rendre la direction encore plus folle, comme sur un vélo de clown sans chasse dont la roue avant oscille de chaque côté toute seule.
Mollo les mecs
Olivier Chevallier prend possession de la moto en écoutant les conseils de Stuart Shenton, fils de Stan Shenton, le team manager de Kawasaki-UK. Chevallier discute avec l'ingénieur japonais basé en Angleterre. Il travaille pour Kawasaki mais se nomme Tekoe Suzuki. Il faut dire que Suzuki est aussi répandu au Japon que Dupont ou Durand en France. Je rentre très lentement dans la première courbe à droite et tout l'avant se met à vibrer, je ne sens aucune fermeté dans la direction la moto prend mal toutes les bosses, en plus les bras de fourche sont très rapprochés et avec ces guidons si serrés j'ai l'impression de conduire une mobylette... C'est l'angoisse ; à la sortie je regarde le compte-tours, je suis à 6000 tours, j'accélère brutalement et ça repart comme sur des roulettes. Quel moteur fantastique on ne sent pas les chevaux mais ça monte en régime, ça monte si vite que je suis à 12000 tours. Je passe une vitesse comme dans du beurre et le moteur continue à accélérer. Je passe les vitesses parce que l'on m'a dit de le faire aux alentours de 11 500 tours mais je me demande ce qui se passerait si je laissais monter, j'ai l'impression que le moteur continuerait à grimper comme ça à toute vitesse... Six mille tours de plage utilisable, ça c'est incroyable ; sur une Yamaha, on en a tout juste le tiers !

En pilotant la Kawa, on ne sent aucune courbe de puissance tellement les chevaux arrivent uniformément de 6000 à 12000 tours. La puissance à 11500 de la Kawa est peut-être inférieure à celle de la Yam (d'où la plus grande vitesse de pointe des Yam, à Spa) mais de 6000 à 10000 tours la Kawa est beaucoup plus puissante. C'est ce qui explique que sur les circuits sinueux la Kawasaki soit nettement supérieure. Si le pilote sort mal d'un virage, il n'a qu'à remettre la sauce et ça repart. Sur une Yam, à moins de 10000 tours on perd cinq mètres, à moins de 9000 il faut rentrer un rapport et on a perdu le contact avec le type qui précède et avec qui on est en bagarre. Je revois la course de Baker à Zolder en 750: sa moto était tellement souple qu'il restait sur la même rapport alors que les autres changeaient trois fois de vitesse. Tout ça c'est du temps gagné en souplesse (c'est le cas de le dire !). Je n'ai jamais senti le moteur s'asseoir, à tout moment j'ai cru que cette montée en régime nes'arrêterait pas. C'est une sensation fantastique.
De la tenue, bon sang !
Cliquez sur la photo pour l'agrandir ! Tout en conduisant, je cherche à dissiper la pénible impression du début, l'image que je me fais de moi perché en équilibre instable sur cette moto. Car au fil des tours, je récupère un peu d'assiette et comme la piste a séché je décide d'attaquer un peu. Je m'habitue à cette direction flottante, tout en réalisant combien cette moto est légère et facile à conduire. En fait, on ne sent pas vraiment la légèreté de la moto en courbe, mais dans les doubles balancés où l'on n'a pas besoin de tirer sur le guidon. La Yamaha m'a habitué à avoir un guidon ferme dans les mains.

Malgré tout j'ai l'impression d'être sur des oeufs et je me dis que si je brutalise cette Kawa je risque de ne plus la sentir. En attaquant j'ai le loisir d'apprécier le freinage bien que je me demande si ce simple disque avant serait suffisant sur un circuit où l'on freine très fort. Ici à Brands Hatch le freinage est parfait, agréable et efficace. En attaque, je commence à sentir l'arrière qui glisse, et le poids sur l'arrière me semble bon à l'accélération. Mais l'avant continue à m'énerver: on a beau rentrer très facilement dans les épingles même en freinant dès que l'on dépasse 120 km/h et qu'il y a une petite bosse la direction s'affole.

A l'accélération pourtant, cet avant trop léger n'est pas gênant car la puissance n'arrive pas brutalement. On sent bien les chevaux arriver et on peut doser la puissance facilement: ce n'est pas le cas d'une Yamaha pointue sur laquelle il est difficile de doser quand on est dans les tours. La moto de l'essai était chaussée de pneus pluie: ils sont sculptés et donc la gomme est plus mobile. Le pneu commence à glisser bien avant d'être à la limite. N'importe quel pilote sur un circuit fait déraper une moto munie de pneus à tétine. Par contre avec un pneu Slick la limite est plus dure à trouver, et le début de glissade est beaucoup plus proche du franc décrochage.

C'est pour cela que j'ai pu très vite sentir l'arrière déraper sur la petite Kawasaki. Pour conclure la 250 Kawasaki a beau avoir un moteur fabuleux je comprends mal pourquoi la partie-cycle est aussi hasardeuse. A voir la merveille qu'est la suspension arrière, tellement efficace qu'on l'oublie, je saisis mal pourquoi le cadre est si long, le moteur si haut placé. En fait, cette moto n'a jamais cessé d'être pilotée par des hommes différents (deux Japonais et quatre Européens cette saison sans compter Hansford) et c'est là peut-être que se trouve la réponse: aucun n'a eu suffisamment de temps pour faire évoluer la partie-cycle. Avec un peu plus de chevaux cette Kawasaki sera la seule moto capable de contrer la Yamaha de Kenny Roberts qui pour moi sera l'homme de mire en 250 l'an prochain.

Et puis la Kawasaki m'a conforté dans l'idée que le poids est l'ennemi en moyennes cylindrées. Gagner vingt kilos sur une moto qui en pèse 120, c'est modifier le rapport poids-puissance de un cinquième. C'est énorme. Je me souviens d'un ingénieur de Matra me disant que sur un prototype de 800 kilos, un gain de 100 kilos équivaut à un gain de 30 chevaux. Et lorsque j'étais avec Didier Pironi au bataillon de Joinville il me disait « Arnoux me rend 10 kilos », alors qu'ils couraient dans des voitures de 500 kilos. Alors pour 78, c'est promis, je surveille mon poids de forme, 62 kilos, pas plus...
Le pour et le contre
Du pilote Du mécanicien
Pour:

- Souplesse du moteur
- Légèreté de l'ensemble
- Freinage
Pour:

- Sérieux de la réalisation (poids plume)
- Belle géométrie de moteur
- Suspension arrière évoluée
Contre:

- Trop de poids sur les poignets
- Moteur trop haut
- Manque de puissance
Contre:

- Bloc cylindres trop classique pas assez puissant
- Moteur trop en avant
- Surtout cette moto nous ridiculise avec trop de facilité nous autres petits préparateurs !
Trois années d'effort
Au début de l'année 75, en février, Yvon Duhamel fut convié à Ontario en Californie par Kawasaki. ll allait y découvrir ses nouvelles machines, une 750 à refroidissement liquide et surtout une nouvelle 250 dont la préparation avait été tenue secrète. Duhamel refusa de donner des détails sur cette moto jusqu'en mars, date de la présentation officielle. Et l'on découvrit avec surprise cet étrange moteur aux cylindres placés l'un derrière l'autre.

Première sortie, Daytona ; la 250 Kawasaki tient la vedette jusqu'à son entrée en piste: et tout de suite elle fait preuve de son manque de puissance. Elle ne peut rien contre les Yamaha: « Pour leur première sortie, les 250 Kawasaki de Duhamel et Ron Pierce ont montré qu'elles manquent singulièrement de vitesse de pointe. Pierce se battait en quatorzième place en début de course un peu devant Duhamel.» Voilà ce que nous écrivions dans Moto Journal dans le compte-rendu de Daytona.
Mick Grant
Mick Grant au G.P. de France lors de sa première course de la saison 76 sur la 250 Kawasaki. L'avoir laissé sur la touche lors des précédents Grands Prix était une grave erreur. Mick Grant Vainqueur de deux Grands Prix, Mick Grant ne cache pas les défauts de sa moto: « Le vrai problème de cette moto, c'est son manque de puissance et sa plage d'utilisation trop large. J'aimerais mieux un moteur un peu moins souple et une moto plus rapide. A Spa et en Finlande on a besoin de chevaux à plein régime...

Lorsque j'ai conduit cette moto pour la première fois je l'ai trouvée très bonne. On a ajusté quelques petits trucs, mais c'était du détail. La tenue de route est bonne, bien que la suspension arrière ne soit pas assez progressive dans les virages très rapides comme le esse de la Verrerie au Paul Ricard. A Spa on glisse parfois de l'avant toujours à cause des suspensions.

En 78 je souhaite vraiment un autre moteur et une moto plus rapide car telle qu'elle existe actuellement elle va bien sur les circuits sinueux mais elle est trop désavantagée sur les circuits rapides où elle est dépassée par toutes les autres. Ainsi, à Andestorp la Kawasaki faisait jeu égal avec le Morbidelli de Lega alors qu'à Brno elle se faisait lâcher.».
Mais trois mois plus tard
Les 250 Kawasaki réapparaissent au G.P. de Hollande à Assen pilotées par Duhamel et Grant. Et que trouve-t-on dans Moto Journal ?« Surprenantes, les 250 Kawasaki, en début de course Grant et Duhamel se bagarraient avec Braun et Kneubuhler pour la 3e place.» Grant a eu des ennuis de freins mais Duhamel lui, a terminé en cinquième position. Mais huit jours plus tard à Spa, c'est la catastrophe: sur ce circuit rapide les Kawa ne vont pas vite et en plus vibrent horriblement à plein régime.

Aux essais, un vilebrequin casse sur la moto de Duhamel: le pignon perce le carter et découpe même le carénage. Duhamel n'est pas qualifié, en course le moteur de Grant vibre et casse aussitôt. C'est la fin de la saison pour les Kawa que l'on ne reverra qu'en octobre à Ontario. Et là, les Kawa se surpassent avec Yvon Duhamel et Masahiro Wada. Sous le titre "Le cas Kawa" voici ce qu'on en disait (toujours dans Moto Canard): Autre conclusion immédiate après Ontario: la 250 Kawasaki dont tout le monde se moquait en début de saison tant elle avait déçu à Daytona et dans les rares G.P. auxquels elle a participé et bien cette Kawasaki commence à atteindre l'âge adulte. Deux victoires dans les manches qualificatives, un net avantage dans la finale avant de casser, voilà qui est surprenant pour cette moto qui n'arrivait pas à suivre les Yamaha modèle 74 à Daytona. Le développement de la 250 Kawasaki est l'oeuvre de deux hommes: le préparateur américain Steve Johnson (ex-mécano de Phil Read en 1971) et le pilote Ron Pierce.

Tous deux ont travaillé pendant la saison entière pour améliorer cette moto en qui ils avaient confiance. Ron Pierce avait été choisi en dernière minute à Daytona pour remplacer Jim Evans blessé ; il n'a ensuite jamais cessé de tester la moto sur la piste et sur le banc d'essai aux côtés de Steve Johnson. La première modification apportée à la 250 Kawa fut de lui mettre un radiateur de 750 pour améliorer le refroidissement, le cylindre arrière ayant nettement tendance à chauffer. Puis Steve Johnson modifia la distribution et les transferts, rabota légèrement la culasse et surtout refit complètement le système des pots d'échappement. Tandis que le pot avant sort normalement en-desous du moteur, le pot arrière fait le tour des cylindres pour ressortir sur le côté gauche au-dessus des distributeurs. Les premiers résultats de ces travaux portèrent leurs fruits et Pierce remporta une course dans le New-Hampshire en juin. Mais la Kawa n'allait pas encore assez vite. Les recherches constantes de Steve Johnson ont fini par aboutir: Wada vainqueur devant les Harley-Davidson dans sa manche qualificative, Duhamel vainqueur de la seconde manche et nettement détaché de Baker en finale avant de connaitre des ennuis de roue avant, voilà qui prouve la maturité de la 250 Kawasaki.

Si en plus les metteurs au point de cette moto travaillent cet hiver pour construire un cadre encore plus petit, on peut d'ores et déjà affirmer que la 250 Kawasaki sera une sérieuse concurrente en 76. La question est de savoir si Kawasaki mettra le paquet pour soutenir une tentative en Grand Prix ; celle de la saison passée a avorté parce que l'usine au Japon n'a pas engagé suffisamment de moyens. Steve Johnson et Ron Pierce avaient carte blanche mais ont dû faire beaucoup de choses par eux-mêmes. Pourtant, en 76, la 250 Kawasaki n'est pas venue disputer les Grands Prix. Ron Pierce a parfois couru avec aux USA, mais la moto était en veilleuse. Officiellement, en janvier 76, Kawasaki avait annoncé son retrait de la compétition, ne laissant que les 750 à l'importateur anglais. Mais huit jours avant Daytona 76, Kawa décide de se présenter au départ. Duhamel blessé ne courut pas en 250, et le petit twin en ligne tomba presque dans l'oubli.

Début 77, on annonce le grand retour de Kawa: Gregg Hansford qui pilote la 250 à Daytona puis Imola prouve qu'elle peut battre ses adversaires. Mais la politique incohérente de l'usine va coûter cher. Ditchburn et un Japonais inconnu, Kyohara, doivent effectuer la première demi-saison. Et c'est ainsi qu'on voit Kyohara se faire battre à Hockenheim par Sarron, tandis que Ditchburn n'arrive pas à s'imposer. En Allemagne, on a vu Muller au guidon d'une Kawa d'usine puis ce fut le tour de Baldé en Italie. Et c'est seulement fin mai pour le G.P. de France que Kawasaki fait rentrer, Mick Grant son meilleur pilote et de loin. Du coup Grant va gagner en Hollande puis en Suède.

Si seulement il avait effectué toute la saison ! Au fond de lui-même, Grant n'a pas apprécié cette farce: c'est pourquoi il a discuté ferme avec Kawasaki de son contrat pour 78. Il disputera tous les Grands Prix en compagnie de Kork Ballington. En principe, Kawasaki doit sortir une 350 dérivée de sa petite soeur et il parait que l'usine veut sortir une petite série de ces motos qui seraient alors confiées à différents importateurs européens. Une histoire à suivre, car la 250 Kawasaki a encore son avenir devant elle.
La Fille prodigue
La 250 Kawasaki sortie en 75 n'est pas la première 250 de Grand Prix construite par la marque. Dix ans plut tôt, en 1965 Kawasaki avait construit une 125 et une 250 twins pour son pilote officiel Dave Simmonds. La 250 Kawasaki sortie en 75 n'est pas la première 250 de Grand Prix construite par la marque. Dix ans plut tôt, en 1965 Kawasaki avait construit une 125 et une 250 twins pour son pilote officiel Dave Simmonds. Un peu plus tard apparut une 350. Les trois moteurs étaient du même type: bicylindre face à la route avec disiributeurs rotatifs latéraux. De cette 250 et de cette 350 Kawasaki sortit une petite série de compétition client, la 250 A 1R et la 350 A 7R que l'on vit en France en même temps que les modèles de route munis eux aussi de distributeurs rotatifs latéraux. Mais la 250 Kawasaki de Grand Prix n'eut jamais le succès escompté ; Simmonds la délaissa vite au profit de la 125 avec laquelle il fut champion du monde en 1969.

Les 250 et 350 compé-client, elles, remportèrent plusieurs titres de champions de France mais Kawasaki ne donna pas suite à cette série abandonnée en 1968. Et si Xavier Maugendre, patron de la Sidemm qui importe les Kawasaki n'y avait pas pris garde, les Kawa compé-client auraient purement et simplement disparu, détruites par les bricolages successifs de leurs pilotes qui tentaient ainsi de les améliorer. Dans sa collection personnelle de Kawasaki de course (of course) Maugendre possède la 125 championne du monde et une 250 A 1R restaurée (photo) qui doivent être uniques au monde. J.B. Essai dirigé et réalisé par Jacques Bussillet avec la colaboration d'Olivier Chevallier sur la piste et d'Alain Chevallier pour la technique. Les photos sont de Christian Lacombe, exceptés les documents techniques du moteur ouvert réalisés par Alain Cochez.

Comme pour la 750, cet essai n'aurait pu être réalisé sans la collaboration de l'équipe Kawasaki Angleterre avec à sa tête Stan Shenton, secondé par sa fille Déborah et son fils Stuart. L'ingénieur Takeo Suzuki a donné toutes les précisions techniques requises (sauf l'angle de chasse et la puissance du moteur) tandis que Jean-François Baldé a mis son moteur à disposition pour qu'il puisse être démonté et photographié (avec l'accord de Xavier Maugendre). Moto Journal les remercie pour cette aide qui a permis d'essayer une aussi belle machine.
Suite de l'article: Une petite merveille
Informations tirées de Moto Journal N° 347 du 19 janvier 1978.
Par Olivier Chevallier.
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